La Chine est membre de l’OMC depuis plus de 20 ans, et de ce fait, les lois appliquées concernant la propriété intellectuelle ne sont guère différentes des nôtres. Pourtant, il est fortement conseillé de déposer sa marque en Chine, quand bien même vendre sur le marché chinois ne fait pas partie de vos projets.
Voici pourquoi, et surtout, comment, protéger votre propriété industrielle et vous prémunir contre les usurpateurs de marques.
Pourquoi devez-vous déposer votre marque en Chine ?
Vous le savez sans doute, si vous avez déposé votre marque auprès de l’INPI (Institut National de la Propriété Industrielle), alors votre titre de propriété est valable uniquement en France.
Concrètement, si vous comptez commercialiser vos produits en Chine en toute quiétude, alors vous devez déposer votre marque en Chine.
Jusque là, rien d’anormal.
Et pourtant, les affaires d’usurpation de marques semblent monnaie courante en Chine. Même les plus grands noms se font avoir : Apple, Supreme, Tesla, Hermès, etc. S’ils ont tous été confrontés à une usurpation d’identité …ils n’ont pas tous obtenu gain de cause.
Dans un article paru dans la Tribune, un spécialiste confie qu’il n’est pas rare de payer des pots-de-vin de 20 000 à 30 000 dollars pour récupérer ses droits sur sa marque.
Malgré des lois qui répondent aux normes imposées par l’OMC, force est de constater que le système de protection de propriété intellectuelle chinois est faillible.
Usurpation de marque : pourquoi le risque est-il plus important en Chine ?
En France et dans la plupart des pays du monde, il faut remplir au moins deux conditions pour déposer une marque :
- Faire une recherche d’antériorité et démontrer que la marque n’est pas déjà la propriété de quelqu’un d’autre ;
- Montrer que l’on fait usage, ou que l’on compte faire usage de la marque.
Vous l’aurez anticipé, en Chine, ce n’est pas exactement ainsi que les choses se passent …
Premier arrivé, premier servi
En Chine, l’usage de la marque n’est pas requis pour en réclamer le titre de propriété. Peu importe qui vous êtes, ce que vous faites ou ferez de cette marque, votre demande est considérée comme légitime par défaut. En d’autres termes : il suffit de demander !
Mais alors, que dire de la recherche d’antériorité ? Ne serait-ce pas un moyen simple et efficace de lutter contre l’usurpation d’une marque ? Certes, mais si la recherche d’antériorité n’a pas décelé l’existence d’un Tesla ou d’un Hermès, on peut imaginer que ce système n’est pas très au point.
Quoi qu’il en soit, il faut se garder de penser que ce genre de mésaventure n’arrive qu’aux autres, et surtout, qu’elle n’arrive qu’aux grands noms de ce monde.
Marque usurpée, qui est-ce que ça concerne ?
Les spécialistes interrogés par l’équipe de La Tribune, recommandent à toutes les entreprises, quelle que soit leur taille, de déposer leur marque en Chine par mesure de précaution, quand bien même :
- Vous n’avez pas l’intention de commercialiser quoi que ce soit sur le marché chinois à court terme ;
- Vous ne faites que fabriquer vos produits en Chine. En effet, si une personne dépose votre marque à votre place, vos produits pourraient être considérés comme des contrefaçons par les autorités chinoises ;
- Vous participez simplement à une foire ou un salon, car votre propriété intellectuelle sera exposée, et donc, vulnérable.
Bon à savoir
Si vous souhaitez commercialiser vos produits en Chine, en plus d’y déposer votre marque, assurez-vous de remplir les exigences liées au marquage CCC.
Bref, qui que vous soyez, il y a de fortes chances pour que les prochaines lignes vous soient d’une grande utilité.
Comment déposer sa marque en Chine ?
Maintenant que vous comprenez l’importance de déposer votre marque en Chine, sans doute êtes-vous plus enclin à réaliser les démarches administratives nécessaires, aussi chronophages et fastidieuses soient-elles.
Deux démarches existent, mais l’aide d’un avocat est recommandée, quelle que soit la procédure d’enregistrement. Par ailleurs, avant d’engager l’une ou l’autre de ces procédures, il faudra bien évidemment d’abord réaliser une recherche d’antériorité en Chine, dont le coût est d’environ $80.
L’enregistrement en Chine (CNIPA)
La première alternative qui s’offre à vous est de déposer votre marque auprès du bureau de la protection de la propriété intellectuelle chinois, le CNIPA. Cette procédure vous coûtera la modique somme d’une centaine d’euros, et votre marque sera protégée pendant 10 ans.
Bien entendu, à ce moment, il faut ajouter les frais d’avocats, mais le montant total de l’opération ne devrait pas vous coûter plus de 200 €. Comptez à peine plus pour le renouvellement.
Déposer sa marque directement en Chine n’est pas l’option la plus aisée, car vous devrez collaborer avec un avocat chinois spécialisé. Malgré tout, cette voie vous permet de bénéficier d’une certaine priorité, et les refus moins courants.
Mais rassurez-vous, si vous n’êtes pas prêt à vous confronter à l’opacité du système chinois, il existe une seconde option qui se veut simple et rapide.
Le dépôt de marque international (OMPI)
La Chine est membre signataire du protocole de Madrid. Autrement dit, les marques qui bénéficient d’une extension à l’international y sont reconnues, sans que vous n’ayez à engager quelconque procédure locale.
Pour que votre marque soit protégée à l’international, vous devez d’abord vous adresser à l’OMPI (Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle) à qui vous devrez régler vos redevances de dépôt.
Ces charges s’élèvent à 653 francs suisses si votre marque est en noir et blanc, et 903 francs suisses s’il est en couleurs. Ce qui correspond respectivement à 680 euros et 940 euros.
À ce montant, il faudra ajouter la redevance par pays, dans le cas présent, votre redevance pour le dépôt de marque en Chine, soit environ 100 euros supplémentaires.
Une fois que vos règlements sont en ordre, vous recevrez un justificatif, que vous devrez présenter au bureau de l’INPI en même temps que votre formulaire de demande d’extension à l’international.
Bon à savoir !
Pour engager cette procédure, vous devez d’abord enregistrer votre marque en France auprès de l’INPI. Cela vous coûtera 235 €
Que faut-il savoir avant d’enregistrer une marque et/ou un logo en Chine ?
Comme mentionné, il est fortement recommandé de collaborer avec un cabinet d’avocats pour déposer votre marque en Chine.
En effet, la procédure est jalonnée de subtilités auxquelles il vaut mieux être confronté aux côtés d’un expert. Voici quelques exemples.
Enregistrer sa marque dans des classes, et des sous-classes !
La Chine utilise le système de classification de Nice. C’est le même que celui utilisé en France, à la différence près qu’il existe en Chine des sous-classes.
Par exemple, la classe “vêtements pour bébés” est subdivisée en sous-classes telles que “chaussettes pour bébés”, “pyjama pour bébé”, etc. Il est conseillé d’enregistrer la marque dans chaque sous-classe concernée, voire celles qui pourraient l’être un jour.
En effet, un usurpateur de marque pourrait en profiter pour réclamer le titre de propriété de votre marque sur une sous-classe.
Traduire sa marque en mandarin
Ce n’est pas obligatoire, mais il est conseillé de déposer la marque en caractère chinois également. Vous l’aurez deviné, cela, pour prévenir une éventuelle usurpation en mandarin.
Attention, n’oubliez pas qu’une marque (et son slogan !) a également une vocation marketing. En ce sens, il ne s’agit pas simplement de traduire mot à mot, cette étape est délicate et requiert les conseils d’un natif.
Pour l’anecdote …
Les erreurs de traduction sont courantes, même chez les grands groupes. Le géant KFC, par exemple, a traduit son slogan Finger Linkin’ good par … Mange tes doigts en mandarin.
Pour le coup, le chef marketing de chez KFC a dû s’en mordre les doigts…
Votre marque n’est pas protégée partout en Chine !
Autre bonne surprise de cette épopée : l’enregistrement de votre marque auprès de Pékin ne vous offre pas de protection à Hong Kong, ni à Macao. En effet, ces deux régions sont des administrations spéciales qui bénéficient d’un système indépendant.
Donc, si vous comptez commercialiser vos produits dans l’une de ces deux régions chinoises, il faudra réaliser une procédure d’enregistrement à part entière.
Les éléments constitutifs d’une marque interdite à l’enregistrement
Enfin, pour être acceptée par les autorités chinoises, votre marque doit répondre à un certain nombre de critères de base, tels que :
- Être constituée d’éléments distinctifs non caractéristiques d’un produit ou service. Si vous vendez des raquettes de tennis, votre marque ne peut pas s’appeler Raquette. ;
- Ne pas être contraire à l’ordre public. C’est-à-dire ne pas susciter au racisme, à la violence, etc. ;
- Ou encore, ne pas créer de confusion dans l’esprit des consommateurs. Vous ne pouvez par exemple pas utiliser de symbole militaire.
En somme, vous l’aurez compris, si vous traitez de près ou de loin avec la Chine, entourez-vous de spécialistes, et n’attendez pas pour déposer votre marque !