Dans un monde aux interdépendances toujours plus complexes et volatiles, la gestion des approvisionnements est devenue un défi stratégique majeur pour la plupart des entreprises. Le sourcing, qui consiste à sélectionner les meilleurs fournisseurs et sources d’approvisionnement au meilleur coût, s’inscrit désormais dans un contexte instable où les risques de rupture sont exacerbés. Face aux soubresauts géopolitiques, aux catastrophes naturelles à répétition, aux pénuries de matières premières et aux défaillances éventuelles des fournisseurs, une gestion proactive et structurée des risques s’impose plus que jamais pour sécuriser les chaînes d’approvisionnement et assurer la pérennité des activités.
Identifier et évaluer avec précision la myriade de risques
La première étape d’une démarche de gestion des risques réside dans leur identification exhaustive et leur évaluation rigoureuse. De multiples catégories de risques potentiels doivent être passées au crible, comme les risques « fournisseurs » liés à une possible défaillance, un manque de fiabilité ou encore des pratiques non éthiques. Les risques dits « pays » associés à l’instabilité politique, réglementaire ou sécuritaire dans les zones d’approvisionnement représentent aussi une menace de poids, tout comme les risques géopolitiques avec les conflits commerciaux et les guerres économiques entre grandes puissances. Sur le plan opérationnel, le sourcing doit par ailleurs se prémunir contre les ruptures d’approvisionnement, les problèmes de qualité ou encore les retards de livraison qui peuvent avoir un impact dévastateur.
Enfin, les aléas économiques comme la volatilité des coûts des matières premières et des devises, l’inflation galopante ou les crises financières mondiales induisent de lourds risques budgétaires à ne pas négliger. Une cartographie exhaustive de chacune de ces familles de risques, pondérée en fonction des enjeux métiers et de leur criticité potentielle, permet d’obtenir une vision d’ensemble précise afin de concentrer les efforts sur les points les plus sensibles.
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Déployer des stratégies de prévention et d’atténuation adaptées
Une fois l’ensemble des menaces cartographiées et hiérarchisées, l’entreprise doit définir et mettre en œuvre des stratégies de prévention et d’atténuation à la mesure des enjeux identifiés. Certains risques pourront être traités en amont par la diversification des panels fournisseurs, que ce soit en termes de zone géographique, de taille ou de process industriel. Cette approche « multi-sources » permettra de réduire considérablement les risques de dépendance vis-à-vis d’un fournisseur unique et d’accroître la résilience générale.
D’autres menaces appelleront des solutions de transfert du risque par le recours à des contrats d’assurance ou à des instruments financiers de couverture contre les variations de cours des matières premières. Dans certains cas, la constitution de stocks de sécurité tampon ou « stratégiques » pourra s’avérer judicieuse pour amortir les chocs sur la supply chain. Mais au-delà des mesures préventives, il importe aussi de renforcer les contrôles et les audits tout au long du processus pour s’assurer du respect des normes de qualité, sociales et environnementales par l’ensemble des fournisseurs et sous-traitants.
Améliorer la visibilité et la traçabilité de bout en bout
L’une des clés pour une gestion optimale des risques réside dans l’amélioration de la transparence et de la traçabilité de la supply chain dans sa totalité. L’adoption d’outils de suivi en temps réel des flux physiques et de solutions de monitoring des flux d’information offrira une visibilité de bout en bout sur tous les maillons de la chaîne. Cette transparence accrue permettra d’identifier plus rapidement les zones de vulnérabilité et d’anticiper bien plus efficacement l’impact des aléas pour s’y préparer et les circonscrire.
Au-delà de ces mesures, certains acteurs industriels font figure de pionniers en la matière, à l’image de ce groupe agroalimentaire qui a su diversifier ses sources d’approvisionnement en cacao en multipliant ses partenariats avec des coopératives implantées dans une douzaine de pays différents. Cette stratégie multi-locale lui permet aujourd’hui de ne plus dépendre d’une seule zone géographique en cas d’aléa climatique, politique ou sanitaire.
Autre exemple inspirant, celui de cette entreprise textile qui a développé une plateforme numérique de traçabilité « de la fibre au vêtement » lui assurant une parfaite visibilité sur l’ensemble des composants utilisés et de leurs origines respectives. Grâce à cette solution, elle peut vérifier et garantir la conformité sociale et environnementale de chaque étape de fabrication, depuis les filières d’approvisionnement des matières premières jusqu’au produit fini.
Piloter et surveiller en continu pour s’adapter avec agilité
Cependant, identifier les risques et mettre en place des stratégies de prévention ne suffit pas. Il est impératif de piloter en temps réel et de surveiller en permanence l’évolution de l’exposition aux différents aléas. Un système d’alerte avancé et des processus de gestion de crise permettront de réagir rapidement en cas de nouvel événement perturbateur, que ce soit une catastrophe naturelle, une flambée des cours d’une matière première ou une cyberattaque paralysant les flux logistiques.
L’agilité et la réactivité sont donc des facteurs clés pour circonscrire au plus vite les impacts et basculer si nécessaire sur des plans d’actions alternatifs comme l’activation de nouvelles sources d’approvisionnement de secours. Cette vigilance de tous les instants exige de s’appuyer sur les technologies les plus récentes d’intelligence artificielle et d’analyse prédictive. Certaines entreprises commencent d’ailleurs à déployer des solutions capables d’anticiper plusieurs mois à l’avance les risques de pénurie ou de rupture, sur la base de l’analyse croisée de multiples données.
Renforcer la collaboration tout au long de la chaîne de valeur
Au-delà des process et des nouvelles technologies, la clé d’une gestion des risques aboutie réside également dans le renforcement de la collaboration avec tous les acteurs de la chaîne d’approvisionnement. En établissant des relations de confiance de long terme avec leurs fournisseurs stratégiques, en les associant en amont dans une logique de co-conception et d’amélioration continue, les entreprises pourront identifier plus facilement les zones de fragilité et définir ensemble les contre-mesures les plus pertinentes.
Cette dynamique vertueuse de travail main dans la main permettra aussi de déployer plus aisément des plans d’actions conjoints pour faire face aux situations de crise majeures. En sens inverse, les donneurs d’ordres pourront de leur côté apporter conseils et soutien financier à leurs fournisseurs partenaires pour les aider à investir dans de nouvelles capacités industrielles plus résilientes et à renforcer leur maîtrise de la gestion des risques.
Une démarche stratégique de création de valeur durable
Loin d’être un simple exercice défensif, la gestion des risques liés au sourcing constitue donc aujourd’hui un puissant levier de différenciation compétitive, de robustesse opérationnelle mais aussi de création de valeur durable. En rendant leurs chaînes d’approvisionnement plus agiles, plus flexibles et moins exposées aux chocs, les entreprises renforcent durablement leurs performances économiques mais aussi leur responsabilité sociale et environnementale.
Bien menée, la maîtrise de ces risques leur permet d’atteindre un niveau supérieur de fiabilité, de sécuriser leurs engagements et de mieux servir leurs clients. Elles gagnent ainsi en crédibilité et en compétitivité sur leurs marchés, mais contribuent également à construire un écosystème plus vertueux et plus éthique avec leurs partenaires fournisseurs. De quoi ériger cette approche en véritable source d’avantages concurrentiels pérennes, au service d’une croissance rentable et responsable sur le long terme. Sourcer en maitrisant les risques, c’est donc bien plus qu’une simple obligation, c’est un levier stratégique de performance globale pour les entreprises visionnaires de demain.
