Longtemps perçue comme un secteur à part, presque déconnecté des problématiques sociétales et environnementales, l’industrie textile mondiale a été rattrapée ces dernières années par l’impératif d’une production plus responsable et durable.
En effet, sous la pression citoyenne et des nouvelles réglementations, les marques de prêt-à-porter et de luxe, mais aussi les équipementiers sportifs et la myriade d’acteurs tout au long de la chaîne d’approvisionnement textile, n’ont désormais d’autre choix que de repenser en profondeur leurs processus pour intégrer les enjeux d’un sourcing éthique et respectueux de la planète.
Défis d’un secteur sous le feu des critiques
Les défis à relever sont immenses pour cette industrie tentaculaire qui emploie des millions de personnes à travers le globe et dont le poids économique avoisine les 3000 milliards de dollars. Malgré les efforts récents, le secteur reste encore régulièrement épinglé pour ses conditions de travail trop souvent indignes et son recours massif à une main d’œuvre sous-payée, voire exploitée dans certains pays à bas coûts.
La pollution chimique colossale générée par les teintures, les traitements et les innombrables étapes de production est aussi un sujet brûlant, tout comme la consommation pharaonique d’eau que requiert la culture des matières premières comme le coton. Sans parler du manque criant de traçabilité et de transparence tout au long de ces chaînes d’approvisionnement aux multiples ramifications internationales.
Enfin, la surconsommation effrénée de vêtements neufs poussée par les marques elles-mêmes, conjuguée à l’obsolescence accélérée et au gaspillage massif d’invendus par les consommateurs est de plus en plus mal perçue.
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Les fondamentaux d’un sourcing textile vertueux
Face à cet amas de critiques de plus en plus virulentes, les acteurs du textile n’ont d’autre choix que de se réinventer en adoptant les principes d’un sourcing véritablement responsable et durable. Cela passe en premier lieu par le déploiement de codes de conduite drastiques auprès de leurs usines et sous-traitants, avec audits sociaux à la clé, de façon à garantir le respect de conditions de travail décentes pour tous les employés.
En parallèle, un virage à 180 degrés est nécessaire concernant les matières premières utilisées, avec un recours de plus en plus massif aux fibres bio et recyclées comme le coton organique, le lin, les plastiques recyclés ou encore les nouvelles générations de textiles issus des biotechnologies. Les processus de production devront aussi être profondément revus pour devenir beaucoup plus frugaux en eau, en énergie et en rejets polluants, en adoptant les meilleures certifications environnementales existantes comme le « Bluesign » ou la norme iso 14001.
Logistique verte et sélection de fournisseurs responsables
Autre axe majeur de progrès, la logistique et la gestion des flux devront être optimisées pour favoriser les circuits cours d’approvisionnement, tout en réduisant au maximum l’empreinte carbone des transports. Enfin, les critères sociaux, environnementaux et éthiques deviendront des impératifs catégoriques dans le processus même de sélection et d’évaluation des fournisseurs, poussant mécaniquement les récalcitrants à la modernisation.
Des pionniers montrent la voie malgré les défis
Bien que pionnière sur certains aspects, l’industrie textile reste en retard sur d’autres et des progrès significatifs restent à accomplir dans la plupart des entreprises. Quelques marques avant-gardistes ont néanmoins montré la voie, à l’image de cette enseigne de fast-fashion qui a développé une ligne de vêtements éco-responsables entièrement fabriqués à partir de matériaux recyclés comme des bouteilles plastiques ou des filets de pêche.
Ou encore cette célèbre maison de luxe qui s’est associée à des coopératives de femmes artisans au Pérou et au Maroc pour créer des collections mettant en avant le savoir-faire textile traditionnel local dans un esprit de développement inclusif et durable.
Obstacles et conditions de réussite
Malgré ces belles réussites, le chemin reste encore long avant d’atteindre un changement d’envergure pérenne. Les obstacles sont en effet nombreux, avec tout d’abord le surcoût initial induit par l’utilisation de matières premières durables, qui rebute bien des entreprises soucieuses de leur marge.
La difficulté à mobiliser et à engager l’ensemble des multiples acteurs de la chaîne de valeur représente aussi un frein de taille, tout comme le manque de compétences et de formation des équipes sur ces nouvelles pratiques vertueuses. Enfin, dans cette frénésie pour le « green », le risque de « green-washing » et d’artifices marketing creux est important, nécessitant une vigilance accrue.
Le virage de l’économie circulaire
Le développement de l’économie circulaire pourrait représenter une véritable opportunité de disruption pour le secteur textile. En favorisant toutes les solutions de réemploi, de location, d’abonnement, de réparation et de recyclage des vêtements, les acteurs peuvent envisager de profonds changements de modèles économiques pour une gestion beaucoup plus vertueuse et responsable des stocks.
Cela passera aussi par la mise en place de systèmes de logistique « reverse » permettant de récupérer efficacement les produits en fin de vie pour les réinjecter dans des filières de recyclage et de revalorisation.
Une nécessité devenue incontournable
Le sourcing responsable n’est désormais plus un vain mot ou un argument marketing pour l’industrie textile, mais bel et bien un prérequis indispensable pour préserver sa crédibilité et son image auprès des citoyens et des pouvoirs publics. Réconcilier exigences de la mode, éthique et respect de l’environnement est devenu un impératif pour construire un avenir durable pour l’ensemble de la filière.
Le sourcing de textiles et d’habillement à l’échelle planétaire doit ainsi opérer une profonde mutation, passant du statut de simple outil d’optimisation des coûts à celui d’un levier stratégique majeur de transformation vers un développement plus vertueux et responsable.
